PRATIQUE et CONNAISSANCE
Alors que BASO était en méditation au monastère de NENGAKU celui-ci s'approcha et lui demanda :
- vous êtes en train de faire zazen ! aves-vous quelque objet en cela ?
- dans le but de devenir Bouddha !
A ce moment NENGAKU ramassa une tuile et se mit à la polir. BASO lui demanda :
- que faites-vous ?
- je suis en train de faire un miroir.
Habituellement cette anecdote est utilisée pour démontrer que zazen n'est pas un moyen habile utilisable pour obtenir quelque chose (la boudhéité en l'occurence). Ce qui vaut pour la tuile vaut évidemment pour la posture et le pratiquant entend que zazen est zazen et rien de plus.
D'ordinaire on en reste là. Avoir un quelconque projet (bouddha) est fantasque et zazen inutile pour parvenir à ses fins. Sauf que, sauf que ...
... il ne s'agit aucunement de transformer la tuile en miroir car dans cette hypothèse la dualité serait ré-installée. Par contre, polir le miroir est la PRATIQUE qui devient complètement le miroir et la tuile est sémantiquement devenu miroir abolissant ainsi la division entre un sujet qui agit et l'objet qu'il convoite, nécessairement séparés.
Ce récit permet également d'articuler les 3 modes de connaissance dont nous nous sommes déjà entretenus le 25 Mars (réalités ? mais lesquelles !)
1er mode - NENGAKU et BASO en présence, le second faisant zazen.
2ème mode - NENGAKU interrogeant BASO sur l'objet de son action, la faisant entrer dans la rationalité.
3ème mode - BASO dissout la problématique Sujet/Objet en identifiant son acte et son but (supposé) par la puissance de sa pratique dans laquelle il ne se projette néanmoins pas.
En termes bouddhiques on peut dire
1er mode/Nature imaginaire dépendant des mots et circonstances
2ème mode/Nature dépendante éventuellement rationnelle
3ème mode/Nature parfaitement réalisée dans la vacuité constitutive de ce qui apparaissait comme "séparés" dans le premier mode.